Un cri déchirant

Publié le par Murielle Morier

Un cri déchirant

Dix ans après mes dix ans de Avelise

    Ce récit est d’abord l’histoire d’une belle enfant, née dans un foyer aimant. On comprend vite que, tout comme dans les contes de fées, ce bonheur sans nuages ne va pas durer et que, très bientôt, d’affreux cumulonimbus obscurciront l’horizon. Un jour funeste en effet, la jeune héroïne voit son destin basculer après la perte brutale d’un parent.
    Un déménagement plus tard, sa nouvelle vie semble s’organiser sans heurts dans un autre environnement. Tout roule, la vie continue. Mais, aux portes de l’adolescence, notre jeune héroïne se prépare également à entrer au collège en toute innocence. En toute ignorance, pourrait-on même dire, des avanies qui l’attendent, pareil à l’agneau jeté dans une cage aux fauves.

    En effet, perturbée et fragilisée par le deuil récent qui l’a frappée, celle-ci se présente comme la proie idéale aux yeux de certains élèves – même si, rappelons-le, en matière de harcèlement, chaque situation est particulière et la bêtise n’a pas forcément besoin d’une raison spéciale pour sévir.
    Devenue une adolescente bourrée de charme à l’intelligence qui sort du lot (ses résultats scolaires demeurent excellents en dépit des aléas du sort et de ses difficultés d’intégration), la narratrice est rapidement brimée et brisée par une poignée de ses congénères, qui éprouvent un malin plaisir à lui renvoyer une image erronée d’elle-même. Malgré ses nombreuses qualités, elle est en effet affublée de tous les défauts du monde par certains éléments perturbateurs. Ou plutôt par des brebis galeuses qui se croient permis d’agir en toute impunité.
    Ne disposant pas des mécanismes de défense qui lui permettraient de faire face à cette hostilité aussi soudaine que sournoise et, avec le peu de moyens psychologiques que lui offre son jeune âge, difficile pour elle de se confier sur sa détresse. La honte l’emporte, elle s’isole. Quand elle trouve le courage d’informer certains adultes de son mal-être, ceux-ci, forts de la certitude que l’âge bête n’est en principe pas destiné à durer, minimisent la racine du problème et sa gravité. Pour eux, ce ne sont là que des histoires de gamins, autrement dit des enfantillages. « La vie est longue et elle en verra d’autres », semblent-ils estimer.
    Cependant, entraînée dans une sorte de spirale kafkaïenne, la narratrice va sombrer dans l’enfer de la psychiatrie et l’escalade continuera. Je n’en dirai pas plus, lisez ce livre pour comprendre !
    Le fléau du harcèlement scolaire ne date – hélas − pas d’hier. Dans ce livre, Avelise donne de la voix à toutes les victimes : celles d’hier, d’aujourd’hui et de toutes celles qui suivront, car la connerie humaine a malheureusement de beaux jours devant elle.

    Avec une écriture saisissante de justesse, la narratrice décrit sa lente descente aux enfers et dépeint de quelle façon une enfant sans histoire peut du jour au lendemain se retrouver exposée à bien des dangers.
    Après cette lecture, on se rend compte qu’aucune recette miracle ni baguette magique n’existent pour résoudre les maux des ados et on voit également que les parents comme les responsables de structures déjà existantes sont souvent démunis, voire dépassés ou encore mal formés pour prendre en charge toute cette souffrance. Toutefois, sur la quatrième de couverture, on lit : ce « petit livre “coup de poing” doit être lu par tout parent, éducateur ou adolescent. » C’est en effet, le genre d’ouvrage qui devrait occuper une place de choix dans les CDI de tous les collèges de France. Ce serait déjà un bon début.

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