Désuètement romanesque

Publié le par Murielle Morier

Désuètement romanesque

La Villa Rouge : Larmor-Plage, juillet 1939 de Corinne Le Diraison

Chronique du mois d’août du Prix des Auteurs Inconnus (PAI) 2023 dans la catégorie « Littérature blanche »

Quiconque a eu la chance d’arpenter les promenades de certaines cités balnéaires a pu se demander ce qui pouvait bien se tramer des décennies plus tôt entre les murs épais de toutes ces demeures de caractère situées en front de mer. En faisant alterner les lieux, Paris – Larmor-Plage, et les époques, 1998 – 1939, l’autrice invite donc le lecteur, en des moments précis et choisis, à entrer dans l’intimité d’une maison au décor suranné et répond en un sens à cet accès de curiosité. Et de nostalgie aussi, car la Villa Rouge de Larmor-Plage qui donne son titre au livre occupe une place à part entière dans l’histoire. Au point de pouvoir la considérer comme un personnage d’un roman, que je qualifierais d’atmosphères. Au pluriel. Et je dois bien avouer que j’ai, dans l’ensemble, été transportée dans ces différentes ambiances. En particulier quand il était question du passé le plus lointain. Et de l’éveil à l’amour de deux jeunes filles en fleurs, Yvonne et Louise, à une époque où le poids des conventions sociales pouvait accabler de si frêles épaules. Cependant le carcan d’être née femme semble bien léger au regard d’une fatalité plus grande encore, car, en 1939, une tragédie d’ampleur se prépare avec un second conflit planétaire plus meurtrier que le premier qui hypothèquera le destin de nos protagonistes.
Par ailleurs, l’époque contemporaine n’est pas complètement dénuée d’intérêt, quand on suit le parcours d’une jeune femme d’aujourd’hui, Camille, et sa relation au monde du travail. Camille qui abandonnera études et ambitions pour se frotter aux dures réalités… et devenir… caissière dans la supérette du coin.
Donc reprenons pour bien raccrocher nos deux plans spatio-temporels qui n’ont a priori rien en commun : en 1998, Camille, nouvellement embauchée chez Atouprix, fera des livraisons au cinquième étage du domicile parisien d’une dame âgée. Ce qui l’amènera à recevoir les confidences de son aînée pour apprendre ainsi ce qui s’est tramé presque soixante ans plus tôt. À Larmor-Plage, la vielle dame en question, se tricotera en effet des souvenirs qui la marqueront à tout jamais.

Ressenti :

Avec son écriture immersive, des lieux clairement identifiables pour qui connaît ce coin de Bretagne et une atmosphère délicieusement désuète, c’est typiquement le genre d’histoire qui s’annonçait passionnante. De fait, celle-ci avait retenu mon attention et, pour ne surtout pas passer à côté, j’avais donc sélectionné ce titre parmi mes « chouchous ». Alors que reste-t-il de mon enthousiasme après lecture ? Pour l’essentiel, les promesses sont tenues ; les allers et retours entre présent et passé donnent du rythme au récit en conférant le suspense voulu.
Cependant c’est le charme rétro des différentes scènes de genre de 1939 que j’ai le plus apprécié. Avec le recul de l’Histoire, on comprend que, pour ces jeunes personnes que sont Yvonne et Louise, dont l’existence s’apparente encore à une page blanche, le temps de l’insouciance sera de courte durée. Et cet aspect-là, dont l’intrigue se nourrit, tient la route jusqu’à la dernière ligne.
Ainsi dévore-t-on ce roman comme on se laisse ravir par des photos patinées par le temps ou encore lorsqu’on découvre des lettres oubliées qui ont tant à révéler : d’affaires de cœur en secrets d’alcôve, un indéniable souffle romanesque anime ces pages venant confirmer ma première (bonne) impression.

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